The Last of Us
Dans "The Last of Us", diffusé récemment sur RTS1, la fin du monde est pour aujourd'hui. Victime d'un champignon parasite, les humains se transforment en zombies. Seuls face au désastre qu'ils comptent éradiquer, un baroudeur et une ado mystérieusement immunisée, font équipe pour sauver leurs semblables. Un sombre road movie en quête de lumière.
Dès le générique, dont les notes s'égrènent à la guitare, le téléspectateur plonge dans un univers stylisé. Imaginé comme une peinture abstraite et inquiétante, où des lichens et autres végétaux serpentent sur l'écran jusqu'à l'envahir complètement, on sent qu'il n'y a pas de place pour l'être humain. La Nature a repris ses droits.
" The Last of Us", pur produit de la chaîne câblée HBO qui l'a lancé le 15 janvier 2023 aux Etats-Unis - dans la foulée, la RTS l'a diffusée dès le 19 février tandis que la saison 1 en 9 épisodes fait partie du catalogue de Prime Video - s'affirme comme la série phénomène de ce début d'année. Et pourtant rien n'était gagné d'avance. Parce qu'il est fort difficile d'adapter un jeu vidéo culte sans tomber dans une succession de scènes d'action sans aucune profondeur. Souvenez-vous notamment de "Resident Evil" ou encore de "Tomb Raider" qui n'avait pour intérêt que la plastique d'Angelina Jolie. Joli succès au box-office mais critiques mitigées, voire négatives....
Tour de force, l'oeuvre, créée par Craig Mazin, à qui l'on doit la percutante mini-série "Chernobyl"(2019), arrive à surpasser les souvenirs des gamers sur PlayStation en 2013. La proposition artistique de "The Last of Us" décliné en série télé est si élevée qu'on en reste bouche bée. Conséquence: elle remporte tous les suffrages du côté du public, mais aussi des critiques. Mélange subtil entre "Mad Max" et "The Walking Dead", le jeu video était une merveille. Or le feuilleton de Craig Mazin a réussi le pari d'être à la hauteur du jeu et même de le détrôner en lui donnant une âme.
Les audiences caracolent partout dans le monde: selon l'Agence Nielsen, grand ordonnateur des audimats outre-Atlantique, l'épisode 3 qui raconte avec subtilité une romance gay dans un monde post-apocalyptique a enregistré 6,4 millions de téléspectateurs sur HBO, soit une augmentation de 12 % par rapport au deuxième épisode qui avait attiré 5,7 millions de personnes. D'accord, c'est moins que "House of the Dragon" avec ses 10, 2 millions de spectateurs au deuxième épisode, mais c'est mieux qu'une autre série-phare de HBO, couronnée de prix, "Euphoria" avec la star de la chanson Zendaya.
Chronologie d'un désastre
Mais plantons le décor pour commencer: direction 2033 et gros plan sur un monde post-apocalyptique, comme dans le jeu video, infesté par le terrible Cordyceps, un champignon tueur - tremblez, il existe pour de vrai! - qui a pris possession des trois-quarts de l'humanité en métamorphosant votre inoffensive voisine de palier en repoussante zombie cannibale. Echappée à tout contrôle, l'épidémie a ravagé notre civilisation en 2023. Du coup, la Nature a tout envahi, et repris le contrôle du paysage et du vivant.
L'intrigue s'articule autour d'un duo improbable: Joel Miller (Pedro Pascal, tête d'affiche de "Narcos" et "The Mandalorian"), 37 ans, et Ellie Williams, (Bella Ramsey, vue dans la saison 6 de "Game of Thrones"), 14 ans. Quand Joel découvre qu'Ellie est infectée, mais que le virus ne se propage pas dans son organisme, alors qu'il détruit ses hôtes en moins de trente-deux heures, il entrevoit le début du chemin vers un vaccin. Et l'espoir d'une nouvelle vie sur Terre.
La foi en une espérance, voilà l'un des points forts qui différencie "The Walking Dead", autre série phare post-apocalyptique, de "The Last of Us". Alors que tout est perdu dans "The Walking Dead" - les protagonistes ne font que survivre - il y a bien la perspective d'une solution, d'une sortie de secours dans l'oeuvre de Craig Mazin.
Commence alors un voyage presque initiatique à travers ce qu'il reste des Etats-Unis: Joel Miller est chargé d'emmener l'adolescente en lieu sûr auprès de rebelles - nom de code Les Lucioles, capables - selon toute probabilité, de transformer son immunité en remède miracle. Contrairement au jeu vidéo de Naughty Dog, plus schématique, la série, de par son cheminement en plusieurs épisodes, permet d'approfondir les personnages. Alors qu'au départ, l'actrice Bella Ramsey a montré les aspects les plus durs et insolents d'Ellie, elle dévoile les faiblesses et les sentiments de l'héroïne à mesure que sa relation avec Joel Miller, sorte de mercenaire protecteur, évolue. C'est cette relation qui fait apparaître l'humanité profonde de chacun d'eux, bien au-delà du jeu vidéo.
Une claque visuelle
Mais en dehors de son statut d'adaptation réussie, la série de Craig Mazin fait preuve d'une cinématographie exceptionnelle. Eh oui, on peut parler de zombies et créer un univers d'une beauté époustouflante: gratte-ciel effondrés ou escaladés par le lierre, tel un boa, voitures éventrées, abandonnées sur des chaussées défoncées, grands espaces prisonniers sous la glace, plongée fascinante dans un supermarché désaffecté, jungle épaisse où on ne distingue même plus les ponts de granit... Baigné dans une brume mélancolique, sans une once de ciel bleu, ce décor de fin du monde présume que la Nature a gagné. Evidemment on ne peut s'empêcher de penser au réchauffement climatique et à toutes les alertes écologiques. La série s'ancre dans l'actualité.
Et si la Nature s'était vengée? C'est un champignon, pas même la bombe atomique, qui a réduit notre monde à zéro! Reste une lumière crépusculaire digne des enluminures d'autrefois. Le décor, c'est sûr, est partie prenante de la narration. Il accompagne ce road movie - ou plutôt cette road série! - où le voyage se révèle plus important que la destination.
Entre "Mad Max" et "Thelma et Louise", "The Last of Us" - dont la saison 2 est déjà sur les rails, mais pas visible avant 2025 - nous invite à une cavale vers l'introspection avec, en prime, une réflexion sur l'humanité qui nous distingue dans cet univers du vivant, où l'Homme est le seul à pouvoir transformer son destin.
Publié par Anne-Catherine Renaud
Intéressante analyse et pour une fan de jeux vidéo ca fait plaisir que la série soit mise en avant en ce moment !
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerMerci pour ce blog qui donne une vision complète, détaillée de ce monde qui sont les séries. Je ne connais pas « Last of us », mais vous m’avez donné envie de m’y intéresser.
J’ai eu beaucoup de plaisir à vous lire.
Je me réjouis du deuxième article.
Meilleures salutations
Merci pour votre intérêt et le message! Si cela vous donner envie de vous intéresser aux séries, le but est atteint.
SupprimerMerci pour votre blog, il est agréable à lire, vous donnez envie de plonger dans ce monde apocalyptique avec une grande finesse d’écriture.
RépondreSupprimerMe réjouis de lire l’article suivant.
Merci pour ce message très sympa et pour votre intérêt!
SupprimerJe trouves l histoire très intéressante
RépondreSupprimerMerci d'avoir lu et commenté!
SupprimerC est intéressant
RépondreSupprimerMerci!
SupprimerTrès beau descriptif, moi qui n’y connais pas grand chose, j’ai ainsi tous les éléments pour m’en faire une opinion et je suis tenté de visionner cette / ces séries.
RépondreSupprimerMerci
Je viens de regarder 2 épisodes enregistrés et tout ton commentaire développe exactement ce que je ressens de cette série. Elle prend les tripes et fait réfléchir. Merci.
RépondreSupprimerMerci d'avoir pris le temps de lire l'article. Si cela vous a donné envie de regarder la série, c'est top!
SupprimerJe viens de voir 2 épisodes enregistrés et je ressens tout à fait ce que tu nous décris. C'est fort et cela fait réfléchir. Merci
RépondreSupprimerMerci de l'intérêt porté à l'article et du retour!
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